Présentation de la Réserve de Biosphère du Dja

Introduction

Créée en 1950, la Réserve de Faune du Dja (RFD) couvre une superficie de 526.000 Ha. Elle est située dans la partie méridionale du pays, à cheval entre les provinces de l’Est et du Sud respectivement dans les départements du Haut Nyong et le Dja et Lobo. La rivière Dja constitue pour la réserve, une bonne barrière dans la mesure où elle couvre à peu près 4/5 de ses limites.

En 1981, le Dja a acquis le statut de Réserve de Biosphère. Dès lors sa superficie qui jusque là était contenue dans la boucle que forme la rivière dont elle porte le nom, va s’étendre pour englober la périphérie. On estime grossièrement à un peu plus de 800 0001 ha, la superficie actuelle de la Réserve de Biosphère du Dja (RBD). En 1987, à la demande du Gouvernement camerounais, l’UNESCO a décerné le statut de site du patrimoine mondial à la RBD. Sur le plan territorial, la RBD touche 07 unités administratives dont 03 dans le Haut Nyong (Arrondissements de Lomié, Abong Mbang/District du Dja, et Messamena/District de Somalomo) et 04 dans le Dja et Lobo (Arrondissements de Bengbis, Meyomessala, Djoum et Mintom). De même, la RBD est à cheval entre 07 communes qui sont circonscrites dans les territoires d’unités administratives précitées.

Populations et activités socio économiques

La RFD n’est pas habitée de l’intérieur ; mais une population de plus en plus importante gravite au tour. La population originelle du Dja est composée de 06 groupes ethniques dont 04 sédentaires (Djem, Badjoué, Bulu, Fang) et deux semi nomades (Baka et Kaka). En 1988, cette population a été estimée à environ 40 000 habitants. Elle est inégalement repartie autour du Dja avec des grandes concentrations dans les principales agglomérations de la périphérie où l’on rencontre beaucoup plus les allogènes qui s’ajoutent à un petit fond d’autochtones. Ces allogènes y sont attirés par les richesses du Dja et ses environs. Ils viennent d’autres régions du Cameroun mais également de partout ailleurs dans le monde. Les populations autochtones du Dja pratiquent essentiellement l’agriculture et la chasse. L’élevage n’y est pas développé ; la pêche se fait de manière artisanale. L’exploitation forestière est en plein essor autour de la RFD où certaines UFA2 ont déjà été attribuées. L’exploitation minière est au stade de démarrage avec la société GEOVIC qui vient d’obtenir un permis dans la région de Lomié (au lieu dit Kongo) à l’Est de a RBD. Cette société américaine qui est en cours d’installation compte y exploiter deux minerais : le cobalt et le nickel.

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Nous aurons une estimation précise de la superficie de la RBD après les travaux de zonage qui constituent une priorité dans la mise en œuvre du Plan d’Aménagement.

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Unité Forestière d’Aménagement

Autour du Dja se déploient aussi de nombreux chercheurs et partenaires au développement ou à la conservation (ECOFAC, PMdA, PGS, CED, UICN, Living Earth…). Leur présence a motivé la création de nombreuses ONG et associations locales qui relaient leurs travaux sur le terrain.

Importance sur le plan Biologique

Une évaluation rapide de la biodiversité du Dja en prélude à la finalisation de son Plan d’Aménagement a démontré que la RBD est le centre de la biodiversité de l’Afrique centrale dans la mesure les espèces animales et végétales qu’on y trouve sont variées en terme de richesse aussi bien intra qu’interspécifique. Par exemple, pour ce qui est de la faune3, on y a pu dénombrer jusqu’à ce jour :

Un habitat diversifié héberge cette importante diversité animale. En effet la RBD est couverte par une forêt dite de transition qui reçoit les influences de la forêt littorale à l’Ouest, celles de la forêt semi caducifoliée de la région de Belabo au Nord et celles de la forêt sempervirente au Sud. En dehors de ces influences, plusieurs types de forêts ont été recensés à l’intérieur de la RBD. On y rencontre par exemple :

Gestion de la RBD

La gestion de la RBD incombe au Ministère de l’Environnement et des Forêts représenté localement par le Service de la Conservation. Le quartier général de ce Service se trouve à Somalomo au Nord de la Réserve. Pour une bonne couverture de la réserve, il a été procédé à un découpage imaginaire du territoire de la RBD en 04 antennes (antenne Est dont la base est à Lomié, antenne Sud dont la base est Djoum, antenne Ouest dont la base est à Meyomessala, et antenne Nord dont la base est à Somalomo). Chaque antenne a à sa tête un Chef d’Antenne qui dirige une Equipe Mobile d’Intervention Rapide (EMIR) faite d’une dizaine de gardes. Actuellement, la RBD compte 49 gardes et chauffeurs. Pour renforcer la surveillance dans la RBD et en application des recommandations du séminaire de l’Unesco tenu à Sangmélima en 1998, le Gouvernement du Cameroun a créé un réseau de 10 Postes Forestiers et Chasses autour de la RBD. Le programme ECOFAC/CAMEROUN a pourvu ces Postes en bâtiments et le MINEF (Ministère de l’Environnement et des Forêts) y a affecté les responsables qui travaillent en collaboration avec les antennes. En fait, les postes qui sont pour la plupart situés dans les endroits assez reculés jouent beaucoup plus le rôle de relais

Les inventaires pour finaliser les travaux ainsi commencés et qui intéresseront d’autres espèces d’animaux tels que les reptiles sont prévus dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’aménagement.

d’informations au niveau de l’antenne pour les opérations qui demandent une forte intervention. Chaque Poste est pourvu d’une radio qui lui permet d’être en contact en temps réel avec le quartier général et avec les autres bases.

En terme de participation, vu le nombre élevé d’intervenants dans la RBD, il s’est senti la nécessité d’une structure de coordination qui faciliterait le dialogue entre les acteurs du développement et ceux de la conservation de manière à avoir une cohésion dans les différentes interventions. Ainsi, avec l’appui de l’UICN/CEFDHAC, nous avons mis en place le Forum4 des Acteurs intervenant dans la Conservation et le Développement dans la Réserve de Biosphère du Dja. Ce Forum est déjà fonctionnel dans le département du Haut Nyong. Sa nécessité vient d’être reconnue dans le Plan d’Aménagement et il est question de l’élargir dans toute la RBD notamment dans le département du Dja et Lobo.

Pour ce qui est de plan de suivi, nous avons développé avec l’appui du Programme ECOFAC une méthode de suivi écologique qui utilise le GPS et le cyber traker. Nous réalisons deux campagnes de suivi5 par an. La méthode manuelle anciennement utilisée qui consistait à noter à la main le point GPS et l’observation faite a été progressivement remplacée par l’utilisation du cyber traker et du GPS (Palm pilote avec GPS incorporé). Les données collectées sont traitées puis insérées sur un fond de carte de la réserve. Les résultats des différentes campagnes sont disponibles dans nos services.

Les Projets/programmes d’appui

La RBD bénéficie de l’appui de deux (02) projets de l’Union Européenne. Il s’agit du Programme ECOFAC et du Projet Mesures d’Accompagnement autour du Dja (PMdA-Dja).

ECOFAC est un programme régional qui s’exécute dans tous les pays de l’Afrique Centrale. Le Dja héberge la Composante Cameroun de ce programme qui y est installé depuis 1992. La troisième phase Programme ECOFAC s’est achevée en décembre 2003. Actuellement, la Composante Cameroun est presqu’en situation de gardiennage dans l’attente d’une éventuelle quatrième phase qui est supposée commencer en 2005. Cependant, le Gouvernement a pris des dispositions pour que les écogardes6 soient maintenus au Service de la Conservation après la rupture des liens contractuels qui les liaient au Programme ECOFAC. Des efforts sont faits tant du côté de l’Etat que du côté de ses partenaires pour que ces gardes soient au moins en état de fonctionnement minimum.

Le PMdA-Dja est né à la suite du réajustement intervenu dans les missions du Programme ECOFAC qui à un moment donné devait se défaire de ses missions de

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Les textes statutaires du Forum des Acteurs intervenant dans la Conservation et le Développement dans la Réserve de Biosphère du Dja sont disponibles dans nos Services et au Bureau Régional de l’UICN à Yaoundé.

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Cette présentation ayant été rédigée à Djoudj, nous n’avons pas pu y insérer les données chiffrées. Toute fois nous restons disponibles pour toutes les informations complémentaires. De même, nos bases de données ainsi que notre Centre de Documentation à Yaoundé et à Somalomo peuvent être consultés à tout moment.

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Les écogardes sont les gardes chasse recrutés et payés par le Programme ECOFAC, mais mis à la disposition du Service de la Conservation du Dja pour les missions de contrôle.

départ sur le développement pour se consacrer à la conservation. Ce projet dont la durée est de 03 ans est appelé à mener ses activités suivant 03 axes. Il s’agit de : « Infrastructures, Pistes et Ponts », ce volet est chargé d’ouvrir les principales pistes qui desservent certains grands villages de la périphérie du Dja, afin de donner aux populations concernées, la chance de pouvoir vendre autre chose que du gibier. « Foresterie Communautaires/Faunes », à la faveur de la loi forestière de 1994, l’Etat peut attribuer les portions de forêts aux communautés organisées qui en expriment le besoin. Ces communautés gèrent les espaces qui leur auront été attribués à leur propre compte. Ce volet est chargé d’appuyer les communautés de la périphérie du Dja à remplir les conditionnalités édictées par la loi afin qu’elles demandent les forêts communautaires ou des zones de chasse à gestion communautaire. L’idée telle qu’elle est clairement exprimée dans le Plan d’Aménagement est d’avoir tout au tour de la RFD (qui est considéré comme noyau dur de protection), les blocs de forêt dont la gestion est confiée aux communautés locales, afin que ce corridor serve de matelas de sécurité pour la Réserve. « Développement agricole », à travers ce volet le projet apporte une assistance soutenue aux communautés dans l’approvisionnement des intrants agricoles et dans l’amélioration des techniques culturales ainsi que dans le renforcement de leurs capacités dans la gestion.

Le Résultat attendu in fine est de pouvoir utiliser autrement la forte énergie locale qui devait être investie dans la chasse tout en donnant à la communauté l’opportunité d’avoir d’autres sources de revenus.

Les menaces qui pèsent sur la RBD

Le braconnage: Malgré les mesures fortes de lutte contre le braconnage prises par l’administration, le braconnage reste assez important dans la RBD. Il est favorisé par le développement de l’exploitation forestière dans la région. En effet:

1°/ l’augmentation rapide de la population à laquelle on assiste actuellement dans la région est surtout le résultat de l’exploitation forestière. Car, de par le nombre de sociétés intervenant dans la région, des nouvelles arrivées sont enregistrées presque chaque jour, parmi lesquelles de potentiels braconniers.

2°/ les ouvriers des différentes compagnies forestières constituent un grand marché pour la viande de brousse qui leur est livrée à des prix défiant toute concurrence ;

3°/ l’ouverture des nouvelles pistes qui parfois vont jusqu’à la rivière Dja permet aux braconniers d’avoir accès dans les nouveaux massifs forestiers et leur donne également les facilités d’esquiver les barrières de contrôle.

L’exploitation minière: Un permis d’exploitation minière vient d’être attribué à la société américaine GEOVIC dans la région de Lomié au lieu dit Kongo. Cette société qui est actuellement en cours d’installation prélèvera le nickel et le cobalt. Faute de disposer des informations sur des cas similaires, nous ne savons pas si la santé des animaux de la Réserve du Dja sera sauve. Toute fois, la loi prévoit l’étude d’impact environnemental dans ce genre de cas. Il reste que cette étude soit menée et que des dispositions soient prises pour atténuer les éventuelles conséquences néfastes sur la faune.

Conclusion

Le processus de finalisation du plan d’aménagement de la RBD s’est achevé avec la tenue en janvier dernier du séminaire interministériel de validation du document produit par l’équipe commise à cet effet. Le document corrigé pour tenir compte des observations formulées au cours de ce séminaire attend d’être approuvé par le Ministre de l’Environnement et des Forêts. Le Plan d’Aménagement de la Réserve de Biosphère du Dja est le document de référence dont la mise en œuvre permettra d’arrimer le Dja à un niveau de gestion souhaité pour une aire protégée de son rang. Il est le résultat des efforts conjugués de l’Etat du Cameroun et de ses partenaires notamment l’Union Européenne (à travers le Programme ECOFAC), l’UNESCO (par le biais du fonds Néerlandais en dépôt au Centre du Patrimoine Mondial), et l’UICN.

Le prochain défi qu’il faudra relevé est bien la mise en œuvre de ce plan d’aménagement.