1. Description du Complexe d’Aires
Protégées Tsingy de Bemaraha :
Le
Complexe d’Aires Protégées (AP) Tsingy de Bemaraha se trouve sur le versant
occidental de Madagascar, écorégion de l’Ouest, dans la partie sud de la
Province de Mahajanga, région du Melaky, sous-préfecture d’Antsalova et s’étend
sur une superficie de 157.710 ha. La partie sud jouit le statut de Parc
National avec 72.340 ha de superficie et la partie nord, qui est régie par le
statut de Réserve Naturelle Intégrale, couvre actuellement 85.370 ha de
surface. Il se localise entre 18° 12’ et 19° 07’ de latitude sud – 44° 34’ et
44° 57’ de longitude est.
Le Complexe d’AP Tsingy de Bemaraha fait partie d’une longue barre de calcaire, d’environ 250 km orientée Nord-Sud, entre Morafenobe et un peu plus au sud du fleuve Tsiribihina.
Le massif de Bemaraha est un massif calcaire très accidenté où l’on trouve une multitude de grottes et où le fleuve Manambolo a découpé ses grottes célèbres. La partie occidentale du plateau présente un relief très déchiqueté, recouverte en grande partie par la forêt dense sèche. Il s’agit d’une véritable cathédrale de calcaires et offre l’un des paysages naturels les plus spectaculaires de la Grande île et même du monde. Dans sa partie orientale, la forêt est entrecoupée de savanes.
Le massif karstique de Bemaraha offre une multitude d’habitats naturels qui sont autant d’écosystèmes différents tels que la forêt dense sèche caducifoliée, la végétation buissonnante xérophytique sur Tsingy (plateau calcaire lapiézé) et les forêts sub-humides dans les avens ou les bas fonds humides entre des blocs calcaires ainsi que des savanes arborées ou herbacées.
Si on se réfère à la classification internationale de l’AP, suivant la catégorisation de l’UICN, le complexe d’AP Tsingy de Bemaraha appartient à la fois à la catégorie Ia et II.
Le Bemaraha est un centre d’endémisme aussi bien pour des espèces floristiques que faunistiques.
La différenciation floristique a un fort pourcentage d’endémisme général de 86,7% et de 47% d’endémisme écorégional. Concernant les espèces floristiques, les formations végétales de l’Antsingy comprennent plus de 782 espèces. Neuf espèces sont classées prioritaires de conservation :
-Â Â Â Â Â Â Â Â Khaya madagascariensis, en danger (UICN)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Phylloxylon perrieri, en danger (UICN)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Dalbergia humbertii, en danger (UICN)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Delonix regia, vulnérable (UICN)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Dalbergia baronii, vulnérable (UICN)
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Pachypodium lamerei, rare (ANGAP)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Dypsis madagascariensis, rare (ANGAP)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Diospyros perrieri, menacée (ANGAP)
-Â Â Â Â Â Â Â Â Hildegardia erythrosiphon, menacée (ANGAP)
En ce qui concerne la faune, une vingtaine d’espèces sont endémiques locales. Les espèces faunistiques qu’on trouve dans l’Antsingy sont :
-        des lémuriens : 13 espèces, dont 3 diurnes et 10 nocturnes
-        des chauve-souris : 7 espèces
-        des oiseaux : 94 espèces réparties en 44 familles, on trouve certaines espèces vulnérables telles que Tachybabtus pelzelnii, Ardeola idae, Circus macrosceles et des espèces menacées comme Lophtibis cristata, Accipiter madagascariensis, Accipiter henstii, Philepitta schlegeli.
-        des reptiles et amphibiens : le Bemaraha est la plus riche en espèces de Reptiles et Amphibiens de toutes les forêts caducifoliées de l’Ouest de Madagascar. 88 espèces ont été recensées, dont 22 Amphibiens et 66 Reptiles. Une espèce de tortue Erymnochelys madagascariensis est gravement menacée, et l’espèce Acranthophis madagascariensis est quasi-menacée (UICN, CITES)
-        des communautés aquatiques troglodytes : ce sont des espèces faunistiques qui vivent dans les galeries souterraines. Elles sont encore très mal connues dans le complexe d’AP Tsingy de Bemaraha faute de recherche.
Le Bemaraha tient aussi un rôle écologique vital en tant que château d’eau de la région où se trouve le grenier à riz de la région – la région entourant le lac Bemamba avec une superficie cultivée de 2.000 ha et le complexe Manambolomaty, qui est l’un des trois sites RAMSAR de Madagascar.
Le complexe d’Aires Protégées Tsingy de Bemaraha subit des pressions anthropiques, dont les pressions majeures sont :
-Â Â Â Â Â Â Â Â les feuxÂ
-Â Â Â Â Â Â Â Â les coupes illicites
-Â Â Â Â Â Â Â Â le défrichement
-Â Â Â Â Â Â Â Â la chasse aux lémuriens
-Â Â Â Â Â Â Â Â la collecte de reptiles
-Â Â Â Â Â Â Â Â et la pêche au Réré (Erymnochelys madagascariensis).
Ainsi, les gestionnaires du complexe, après études et analyse des écosystèmes ou habitats, des espèces et fonctions écologiques de ce dernier, ont défini cinq cibles de conservation, lesquels :
-Â Â Â Â Â Â Â Â Forêt dense sèche sur plateau calcaire
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Eulemur
fulvus rufus
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Erymnochelis
madagascariensis
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Brookesia
perarmata
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Uroplatus
henkeli
Un plan de conservation et un plan de recherche ont été institués ainsi, et des protocoles de suivis des cibles de conservation sont mis en place. La fréquentation touristique du Parc est également prise en considération.
2. Classification
du complexe d’Aires Protégées Tsingy de Bemaraha :
L’Aire
Protégées Tsingy de Bemaraha a été créée en 1927 sous le statut de Réserve
Naturelle Intégrale (RNI). L’Etat malgache a entériné le décret de création par
la sortie du décret n° 66-242 du 1/06/66 afin de constituer certains
territoires en RNI en vue de la protection de la flore et de la faune.
Il
a été classé Site du Patrimoine Mondial naturel de l’UNESCO en 1990 suivant les
critères iii et iv.
La
présence de tombes anciennes, réputées renfermer le reste des premiers hommes
installés dans le pays lui a classé Patrimoine Culturel National en 1991.
La
partie sud de la réserve est devenue Parc National en août 1997 afin de
développer sa potentialité écotouristique.
3. L’Ecotourisme au Parc National Tsingy
de Bemaraha :
Compte
tenu de l’objectif de l’Association Nationale de la Gestion des Aires Protégées
(ANGAP), tracé dans le plan stratégique de gestion du réseau d’Aires Protégées
de Madagascar, le complexe d’Aires Protégées Tsingy de Bemaraha est classé
niveau de priorité 1 suivant la sélection et le classement pour le
développement de l’Ecotourisme et la conservation de la biodiversité.
Ainsi,
un plan de valorisation de la zone de récréation du complexe a été établi
comprenant la description des produits & services à offrir aux visiteurs,
le programme d’interprétation, l’aménagement des circuits écotouristiques, un
système d’évacuation sanitaire ainsi que la promotion du site.
Les
modèles des infrastructures d’aménagement ainsi que leurs emplacements dans les
circuits écotouristiques sont étudiés afin de maintenir l’authenticité du site
et l’intégrité de l’écosystème de l’Antsingy. Le Parc National offre
actuellement sept circuits de niveau de difficulté différent aux visiteurs.
Les
principales activités écotouristiques offertes aux visiteurs peuvent être
résumées par : balade dans la forêt, grimpe, observation de faune, balade
en pirogue, culture locale.
L’Ecotourisme
au Parc National Tsingy de Bemaraha a pour buts de :
-Â Â Â Â Â Â Â Â
conserver
les ressources naturelles du site
-Â Â Â Â Â Â Â Â
apporter
des bénéfices générés par l’activité aux populations riveraines
-Â Â Â Â Â Â Â Â
impliquer
les femmes et hommes riverains dans les activités écotouristiques.
Jusqu’ici,
les bénéfices générés par l’Ecotourisme peuvent être résumés comme suit :
-Â Â Â Â Â Â Â Â
création
d’emplois et de services liés directement ou indirectement à
l’écotourisme : guidage, portage, gardiennage, transports en charrette et
en pirogue, restauration, hébergement, …
-Â Â Â Â Â Â Â Â
réalisation
des micro-projets communautaires au niveau des villages périphériques, financés
par les recettes des parts des droits d’entrée dans la Réserve et dans le Parc
Le
nombre des arrivées au site augmente d’année en année, passant de 300 visiteurs
en 1997 (ouverture du Parc) à 3.300 visiteurs en 2003.
4.
Le développement de la zone périphérique du
complexe :
L’objectif du Parc est de conserver le site au profit des riverains par le biais du développement de l’écotourisme.
L’ANGAP
a décidé d’allouer aux riverains les 50% des droits d’entrée aux Parcs et
Réserves, et ce pour financer des micro-projets communautaires.
Un
plan de gestion de développement de la zone périphérique est alors élaboré,
avec la participation des hommes et femmes riverains du site, planifiant des
actions de construction d’infrastructures. Ces micro-projets sont inclus
également dans les plans de développement communaux.
La
zone périphérique du Parc – se trouvant dans un rayon moyen de 2,5 km – touche
2 communes rurales avec une population de 12.000 habitants.
Des
structures de gestion des fonds des parts des recettes des droits d’entrée dans
le Parc sont ainsi mises en place dans les riverains du Parc, et quelques
modestes infrastructures sont actuellement construites : couloir de
vaccination, réhabilitation d’école, centre de santé …
Le
Parc accompagne les concernés par l’organisation des formations pour améliorer
les capacités locales : formation sur le tas, visite d’échanges. Des
appuis sont également menés auprès des autorités locales : maires et
conseillers communaux.
Cependant,
l’on constate que le résultat du rapport conservation / développement insignifiant,
malgré ces réalisations des riverains continuent à exercer des pressions dans
les Aires Protégées. Des améliorations sont actuellement en étude.
5. Cadre institutionnel :
Le
Complexe d’AP Tsingy de Bemaraha fait partie du Réseau des Aires Protégées de
Madagascar, géré par l’Association Nationale pour la Gestion des Aires
Protégées (ANGAP). L’ANGAP est une agence d’exécution
de la Politique Nationale d’Action Environnementale malgache (PNAE), qui a été
ratifiée en 1990 dans le but de réconcilier les malgaches avec leur
environnement naturel.
L’association
a comme Ministère de tutelle le Ministère de l’Environnement, des Eaux &
Forêts ; c’est un ONG d’appui, chargé de la gestion du programme de conservation
des AP à Madagascar.
Le
Réseau d’Aires Protégées de Madagascar compte actuellement 11 Parcs Nationaux,
23 Réserves spéciales et 11 Réserves Naturelles Intégrales.
Les
sites sont gérés soit par l’ANGAP en régie directe
soit par le biais des opérateurs. En ce qui concerne les Tsingy de Bemaraha, la direction du site est confiée au Programme Bemaraha.
Le
Programme Bemaraha, d’une durée de 5 ans, – à compter de décembre 2000 –
financé sur les ressources du 8ème FED, est un programme qui entend
contribuer à la conservation des ressources naturelles dans la région de
Bemaraha, tout en apportant aux communautés rurales de base des alternatives de
développement respectueux de l’environnement.
Le
Programme intervient à l’ensemble de la sous
préfecture d’Antsalova (6.100 Km), située sur la côte Ouest de Madagascar, dans
la province de Mahajanga. La zone comprend :
-Â Â Â Â Â Â Â Â
le massif
karstique des «Â Tsingy », seul site classé Patrimoine Mondial naturel
à Madagascar (le complexe d’Aires Protégées)
-Â Â Â Â Â Â Â Â
un réseau
de lacs classées site RAMSAR
-Â Â Â Â Â Â Â Â
et
d’autres sites d’intérêt biologique et écologique : forêts sèches,
mangroves, lacs.
Le
Programme a pour objectif global de contribuer à un développement économique
régional durable ainsi qu’à la conservation des écosystèmes fragiles dans la
région d’Antsalova. Son objectif spécifique est d’appuyer la gestion durable
des ressources naturelles de la région permettant la population concernée
d’améliorer ses revenus économiques par des méthodes d’exploitation
alternatives rentables non destructrices des ressources naturelles ; il
améliorera parallèlement leurs conditions de vie.
Afin
d’atteindre ces objectifs, des composantes d’activités sont mises en
place :
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Composante
Parc National : qui
s’occupe de la conservation et du maintien de l’intégrité de l’écosystème du
complexe d’Aires Protégées, de l’écotourisme ainsi que de l’appui au
développement des communautés riveraines des Aires Protégées (AP)
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Composante
Site d’Intérêt Biologique et Ecologique (SIBE) : qui s’occupe de l’appui à la gestion des ressources
naturelles hors AP par le biais de la gestion communautaire
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Composante
Développement :
agriculture (riz), élevage et opérations pilotes de sécurisation foncière
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Composante
Infrastructures :
réhabilitation de pistes et bacs, construction d’une piste d’atterrissage à
Bekopaka, appui à l’amélioration des infrastructures sociales de base.
Ainsi,
le Programme Bemaraha, par le biais de sa Composante Parc National assure la
mission de l’ANGAPÂ : «Â Etablir, conserver
et gérer de manière durable un Réseau national de Parcs et Réserves
représentatifs de la diversité biologique du patrimoine naturel propres à
Madagascar. »
Pour
se faire, trois Volets d’action sont créés au niveau de la Composante Parc
National du Programme :
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Volet
Conservation/Recherche :
qui s’occupe de la conservation du site, la recherche au niveau du complexe et
le suivi écologique
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Volet
Ecotourisme : qui
s’occupe de la valorisation des ressources naturelles du site
-Â Â Â Â Â Â Â Â
Volet
Appui au Développement / Education Environnementale : qui s’occupe du développement communautaire des
riverains du Parc, l’implication de ces derniers à la conservation du site, et
éducation environnementale au niveau des écoles riverains du site
La
composante Parc National dispose 35 personnels pour l’accomplissement de sa
mission.