3.2. A PARTIR DE QUAND FAU-IL PROTéGER?

 
3.2.1.Des situations préoccupantes
3.2.2.Les niveaux de menace spécifiques
3.2.3.Les menaces à un niveau plus intégré


La biodiversité subit une érosion particulièrement préoccupante. Il est donc nécessaire de la préserver. Nous allons envisager les différents moyens à notre disposition. La préservation de la biodiversité est, globalement, le rôle assigné aux activités de protection et de conservation. Dans certains cas, la préservation pourra être complétée par des actions visant à reconstituer la diversité biologique.

3.2.1. Des situations préoccupantes

C'est le cas des zones plus fragiles, par exemple, parce que leur surface est physiquement limitée. Par exemple, cela concerne directement les petites iles océaniques. Leur mode de peuplement relève de processus complexes (MacArthur & Wilson). Leur biodiversité est donc plus fragilisable par une intensification de l'exploitation (transition démographique) et une dégradation de l'environnement biophysique (déchets accumulés, pollutuon accrue). Par conséquent, leur faune et leur flore sont menacées.

[Tableau 1, :41, in McNeely et al., 1990]

Le même problème existe pour tous les environnements naturels soumis à une augmentation de l'intensification de l'exploitation, avec aggravement lorsque les conditions biophysiques limitent la productivité naturelle (reconstitution) des écosystèmes. C'est le cas de tous les milieux extrèmes (déserts, toundras, haute montagne). Retour

3.2.2. Les niveaux de menace spécifiques

Nous venons de voir qu'en raison de diverses pressions d'élimination (écologique ou anthropique) des espèces disparaissent, sont totalement éliminées. D'autres sont en régression, leurs effectif diminuent plus ou moins vite. La première tâche en matière de protection est de définir l'urgence de la protection à accorder à une espèce déterminée, avant d'envisager les moyens de conservation à mettre en oeuvre.

Le principal gestionnaire des données sur les espèces menacées est le Centre Mondial de Surveillance de la Conservation (World Conservation Monitoring Centre). Ce centre utilise les données incluses dans le Livre Rouge des Espèces élaboré par l'UICN. Actuellement, ce répertoire inclut des informations sur 60.000 espèces de plantes et sur 2.000 espèces animales. Le niveau de danger auquel est soumise une espèce est classé selon une échelle à 5 niveaux (IUCN categories of threat).

Par ordre décroissant, il s'agit de :

Extinction (Ex) : On considère comme éteinte une espèce qui n'a pas été observée en milieu naturel depuis les 50 dernières années. C'est aussi un critère utilisé par la CITES.

En Danger (E) : ce niveau correspond aux espèces et sous-espèces présentant un risque d'extinction, c'est à dire dont la survie est incertaine les facteurs délétères continuent d'agir. Cette catégorie comprend des espèces dont le nombre est réduit à un niveau critique ainsi que ceux dont les habitats ont subi de telles altérations qu'on les estime en danger immédiat d'extinction. Cette catégorie comprend aussi les espèces sans doute éteinte mais dont la disparition ne remonte pas à 50 ans.

Vulnérable (V) : Il s'agit de taxons qui seraient appelés à passer prochainement dans la catégorie En Danger si les facteurs délétères continuaient d'agir. Cette catégorie comprend : toutes les espèces dont la plupart ou la totalité des populations sont en régression, soit en raison de surexploitation, de destruction intense de l'habitat, ou d'autres perturbations environnementales ; les espèces dont les populations ont été fortement diminuées et dont la sécurité n'est pas encore assurée ; les espèces ayant des populations encore abondantes mais sous la menace de sévères facteurs délétères à travers toute leur aire de distribution.

Rare (R) : Ce sont les espèces ayant des effectifs limités au niveau mondial et qui sans être dans une situation de péril présentent un risque.

Indéterminé (I) : regroupe les espèces des catégories E, V, R, sur lesquelles l'information dont nous disposons est insuffisante pour la rattacher à l'une de ces trois catégories. Retour

3.2.3. Les menaces à un niveau plus intégré

Les menaces qui pèsent sur les espèces sont comptabilisées par le WCMC (World Conservation Monitoring Center). Les données actuelles permettent de craindre à l'horizon des prochaines 20-30 années la la disparition du quart de la biodiversité terrestre totale par suite de la destruction d'habitats, et principalement de la destruction des forêts pluviales tropicales. Au niveau des grands groupes (taxons élevés: classes) les espèces menacées on crû de façon notable au cours des 20 dernières années. Pour les oiseaux (9000 sp en tout), 1000 (11%, 1990) espèces sont sur la liste des espèces menacées contre 297 en 1978. Cette augmentation résulte à la fois d'une élévation du niveau de menaces et d'une meilleure connaissance du statut des espèces.

Au niveau mondial, actuellement (1990) on recense 60.000 plantes et 2000 animaux menacés, c'est à dire inscrits sur le Livre Rouge des espèces menacées.

Globalement, on peut reprendre le tableau de Reid & Miller (1989) pour exposer le statut de conservation des principaux groupes de la biodiversité.

                       Eteint    Menacé    Vulnér   Rare      Indéter  Total    
                                                              m                 
Plants                 384       3325      3022     6749      5598     19078    
Fish                   23        81        135      83        21       343      
Amphibians             2         9         9        20        10       50       
Reptiles               21        37        39       41        32       170      
Invertebrates          98        221       234      188       614      1355     
Birds                  113       111       67       122       624      1037     
Mammals                83        172       141      37        64       497      

Les niveaux de menace servant à constituer les listes rouges ne suffisent pas à définir les menaces, les atteintes aux habitats (modifications physicochimiques) doivent égalementêtre considérées. La notion de rareté est en effet une notion complexe qui devrait faire intervenir des facteurs géographiques, d'habitat et dimension de population locale.

Ces propositions sont rassemblées dans la Table dichotomique de Rabinovitz (1986). Bien que les variables soient continues, cette table dichotomique a été élaborée. Les catégories sont les suivantes :

Distribution géographique : l'espèce occupe une aire de grande taille ou est endémique d'une zone restreinte

Spécificité de l'habitat : L'espèce occupe une grande variété d'habitat ou est liitée à quelques sites spécialisés.

Taille des populations locales : existe-t-il au moins une population importante de l'espèce ou toutes les populations sont réduites?

7 types de rareté sont ainsi définis.

                              Formes de rareté                                            
   Distribution géographique              Large                    Limitée            
    Spécificité de l'habitat         Large     Restreinte    Large    Restreint  
                                                                      e          
 Taille des populations locales     COMMUNE     RARE (A)    RARE (B)   RARE (C)  
     : Par endroit grandes                                                       
Partout petites                   RARE (D)     RARE (E)    RARE (F)   RARE (G)   
Déterminer le type de rareté d'une espèce est important pour définir le mode de gestion de cette espèce ainsi que les priorités à établir entre espèces menacées.

Par exemple, la gestion d'un rare endémique de type C sera focalisée sur la protection de l'habitat spécifique dans lequel l'espèce survit. Celle d'un endémique de type G pourra se faire par réintroduction dans les sites adéquats. Les stratégies pour les raretés à distribution mosaïque (patchy) de type E pourront porter sur la limitation du commerce ou la consommation directe. Les raretés d etype D seront menacées par la distribution d'habitats étendus, ce qui devrait être exceptionnel et devrait donc demander moins d'attention en gestion. Pour toutes ces espèces endémiques, le mode général de gestion le plus approprié repose sur la conservation de leurs habitats particuliers.

Les habitats naturels sont modifiés, altérés ou détruits par l'homme de façon croissante, depuis le néolithique. Actuellement, on estime que 40% de la productivité nette de la biosphère (plantes, algues et bactéries photosynthétiques) est directement consommée, détournée ou gaspillée par l'homme (Vitousek et al., 1986).

DAns ce contexte, la destruction des habitats les plus riches (en terme de biodiversité) est un sujet de préoccupation urgent et grave. Par exemple, 100 m2 de forêt tropicale pluviale (Costa rica) renferment 233 espèces de plantes vasculaires (Whitmore et al., 1985) (soit 1/6 de la flore des Iles Britanniques sur un court de tennis!).

Les données sur la destruction des habitats ne sont pas faciles à obtenir et sont souvent contradictoires. La destruction des forêts pluviales tropicales se fait au rythme de 6[[perthousand]] chaque année, soit 7.3 M ha sur l'ensemble du globe. Les tableaux [3, 4, 5, 6 :45-47 in Mc Neely et al. , 1990] donnent une idée de l'ampleur des problèmes.

Les forêts tropicales ne sont pas le seul environnement naturel posant problème. Les zones méditerranéennes (Eurafrique et Amérique) sont très menacées par l'urbanisation, la pollution et l'extension des cultures. Les zones humides (lacs, marais) sont menacées par la pollution, l'assèchement, la sur-irrigation (Mer d'Aral) et souvent par une synergie de ces problèmes. Les zones de taïga sont menacées par pollution (pluies acides).

[Cf. in McNeely et al., 1990, : 41-47] Retour