L'HIBERNATION




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Dans les régions de climat tempéré, les hivers sont long, froid, la couverture neigeuse rend la nourriture rare, et cette saison représente donc une période critique pour de nombreuses espèces. Pour assurer leur survie, elles doivent la traverser avec succès, et les mécanismes développés pour cela par les espèces animales sont variables. Certaines migrent (oiseaux), alors que d'autres restent et ont développé une résitance au froid (fourrure, graisse) pour affronter les rudesses de l'hiver (Ongulés et prédateurs de montagne ...), ou se mettent à l'abris avec des réserves de nourriture (écureuils...), ou encore se laissent geler (amphibiens, reptiles, insectes).
L'hibernation (du latin hiberna = hiver), est l'une des statégie d'adaptation au froid des plus poussée. En effet, contrairement à l'hivernation, elle ne se résume pas à une simple traversée de l'hiver, puisque cette adaptation comportementale relève également de modifications physiologiques importantes, visant par l'abaissement controlé et reversible de la température corporelle et du niveau du métabolisme de l'animal, à une réduction de la dépense énergétique. L'animal vit ainsi au ralenti pendant plusieurs mois sur ces réserves de graisses en attendant le retour de la belle saison. On recontre cette stratégie dans de nombreux ordres de mammifères dont les monotrèmes (l'échidné), les marsupiaux (le kultarr d'Australie), les insectivores (le hérisson), les chiroptères (beaucoup de chauves souris), mais c'est chez les rongeurs qu'elle est la plus pratiquée (loirs, lérots, muscardins, hamsters, tamias, spermophiles, chiens de prairies, et marmottes).

Pour pouvoir survivre l'hibernant présente certaines adaptations physiologiques. Ainsi il est capable d'abaisser de façon réversible, le niveau de régulation de sa température centrale corporelle à quelque degrés au dessus de la température ambiante, et d'abaisser très fortement son métabolisme. Le rythme de ses battements cardiaques diminue considérablement (de près de 98%). Le muscle cardiaque des hibernants est en quelque sorte insensible aux basses températures et continue à battre même à des températures proches du gel, alors que celui d'un mammifère classique se contracte de façon anarchique et s'arrête rapidement dès que la température corporelle est inférieur à 15 °C.

La marmotte fuit donc la mauvaise saison en se retirant dans son terrier pour y hiberner. Pendant tout l'hiver elle va vivre sur ses réserves de graisses accumulées tout au long de l'été. Le processus d'hibernation se renouvellant chaque année, il implique donc une anticipation de la saison hivernale par une accumulation importante de graisses au cours de l'été, conduisant au développement d'une "obésité" périodique.
Les triglycérides stockés sont métabolisées progréssivement au cours de l'hibernation, période durant laquelle les marmottes cessent complètement de s'alimenter. Cette graisse représente environ un tiers de sa masse corporelle à l'entrée en hibernation, et se répartie également entre les dépôts adipeux internes et sous-cutanés. Une modélisation des échanges de chaleur chez la marmotte à ventre jaune, à révélé la faible contribution des dépots sous cutanés à l'isolation thermique, fort bien assurée par ailleurs par l'épaisse fourrure de l'animal.

Afin d'économiser ses réserves, sa température corporelle chute d'une trentaine de degrés (5 à 8 °C). La marmotte se roule en boule, car c'est la position qui lui procure un rapport surface/volume de 1,1 par rapport à une sphère de même volume, position qui conserve le mieux la chaleur en reduisant au minimum les surfaces d'échanges avec l'extérieur. Son coeur bat très lentement: il passe de 130 battements/min à 15 battements/min, et sa respiration devient à peine perceptible (<5 cycles /min).

Pour en savoir plus sur la réduction de Température et de métabolisme

Bien que l'avantage de l'hibernation apparaisse évident, aucun hibernant ne peut dormir tout l'hiver de façon ininterrompue, et il est donc restreint par la venue de réveils périodiques. La capacité à revenir périodiquement à la normothermie (37 °C) en quelques heures est un phénomène caractéristiques à tous les hibernants, la fréquence et la durée de ces réveils variant grandement avec les espèces. Chez la marmotte, si la durée des phases de torpeurs varient de 3 à 10 jours suivant leur situation chronologique dans la saison d'hibernation , celle des réveils n'excède jamais 48 heures. En milieu d'hiver, la durée des phases de torpeur s'allonge, de même que l'aptitude de l'animal à abaisser sa température centrale. Au contraire, le début et la fin de l'hiver sont marqués par de brèves périodes de torpeur et un abaissement moins important de la Tc de l'animal.
Le processus de réveils suppose une augmentation périodique de la production de chaleur, et son coût énergétique est donc élevé: 90% des pertes de poids pendant l'hibernation sont dues à ces réveils. On a calculé par exemple que chez le lérot un réveil = 10 jours d'hibernation. Pour un animal de grosse taille ce coût serait exhorbitant et nécessiterait une accumulation de graisse ou de réserves alimentaires trop importantes pour un individu (la marmotte est d'ailleurs le plus gros des hibernants). C'est sans doute une des raison de la relative faible occurence de l'hibernation dans le règne animal. Cependant ces réveils sont indispensable à l'hibernation, et si expérimentalement on prive des animaux de réveils périodiques, ils meurent.
Pour en savoir plus sur les réveils périodiques

Au cours de ces réveils la marmotte présente une activité diversifiée. Elle commence souvant son réveil par une exploration de son environnement et l'achève souvent par un arrangement de son nid. L'animal passe plus de 90% de son temps en posture d'hibernation (en boule), le reste du temps étant réparti entre les toilettages, le jeu, les déplacements, l'excrétion et la mixion, l'entretien du nid.
Chez la marmotte alpine il a été démontré l'existance d'une thermorégulation sociale. En effet l'hibernation est une phase critique pour les juvéniles dont la taille ne permet pas de stocker autant de graisse que les adultes. Il existe une synchronisation des réveils des individus du groupe, qui sont généralement initiés par les mâles. La synchronisation permettrait le rechauffement de l'hibernaculum. Ce gain d'énergie contribuerait à l'économie des réserves lipidiques des jeûnes et ainsi augmenterait leur chance de survie à la sortie d'hibernation. Ce gain est aussi valable pour les autres individus puiqu'il a été montré que c'est dans les grands groupes de marmottes hibernantes que les pertes de poids sont les moindres.
Après plusieurs heures d'éveil, la marmotte perd de nouveau sa thermorégulation et retourne progressivement en sommeil hibernal. Elle reprend la position étalée du corps pour perdre de la chaleur, puis s'immobilise.

Cette succession périodique dans le temps d'états physiologiques si différents font que la vie d'un hibernant est régie par des rythmes qui affectent toutes ses fonctions physiologiques (rythme de poids, de prise alimentaire, de la température centrale, du métabolisme de base, de la consommation d'eau et de la mue) et vraissemblablement ses fonctions endocrines (surrénalienne, hypophysaire, testiculaire). La marmotte présente une rythmicité endogéne de prise alimentaire, de la masse corporelle et de l'hibernation, dont l'origine et le fonctionnement restent encore à élucider.

Un livre ancien sur l'hibernation.

Autres liens :
Société Internationale sur l'hibernation http://www.healthsci.utas.edu.au/physiol/HibSoc/Hib.html

L'hibernation chez les Échnidés.