Citation : Dubos C. 1993. Les demandes et les coûts liés à la marmotte. D.E.S.S. Ressources naturelles et environnements, E.N.E.S.A.D., p. 30.

RESUME

La marmotte est un élément de la faune sauvage qui suscite de nombreuses demandes ; si autrefois cet animal possédât une valeur marchande, les demandes sont actuellement essentiellement récréatives et culturelles. Par ailleurs, les marmottes, lorsque les populations deviennent trop importantes, occasionnent des dégâts aux surfaces agricoles provoquant ainsi le mécontentement des agriculteurs.

Le volet socio-économique du programme multidisciplinaire national sur la marmotte, par la confrontation de l'offre et de la demande tente de trouver des indicateurs de la valeur sociale et économique de l'animal.

La demande étudiée principalement est celle liée aux usages récréatifs (tourisme, chasse) de la marmotte. Cette valeur d'utilité est approchée par des enquêtes auprès des différents publics demandeurs qui tentent de mesurer, d'une part l'intérêt pour l'animal, les consentements à payer pour en voir et d'autre part la contribution globale de la marmotte à l'attractivité des zones de tourisme. L'avantage que représente la présence de la marmotte pour une commune est mesuré par les différentes demandes.

L'estimation de l'offre se limite à évaluer le coût supporté par les agriculteurs dans leur coexistence avec ce rongeur. La comparaison des demandes et des coûts permet d'aboutir à une représentation globale de l'importance de la marmotte dans un territoire particulier. Mais cette démarche socio-économique se place dans un climat conflictuel résultant de la coexistence tourisme-agriculture-protection du milieu, obligeant ainsi à resituer la marmotte dans ce contexte.

ABSTRACT

In this study, we focused on the Alpine Marmot's cost and request obtained by a socio-economic analysis. However, we have seen that the marmot contributed to the mountain's attraction.

These procedures are studied from the point of view of supply and demand. We carefully distinguish the case of recreative using demand (tourism, hunting) of marmot and possible cost supported by farmers in their coexistence with the rodent.

The estimate method considered in these paper are based on a comparaison between supply and demand in order to estimate social and economic value of marmot.

Introduction

Ce stage d'une durée de six mois, a été effectué au sein de l'équipe mixte INRA Economie et Sociologie Rurales - ENESAD (Etablissement National d'Enseignement Supérieur d'Agronomique de Dijon) au département d'économie et sociologie, sous la tutelle de Luc Thiébaut, Maître de conférences.

Cette étude s'inscrit dans un programme de recherche "Mécanismes régissant l'organisation socio-spatiale des populations de Marmottes dans les Alpes" bénéficiant d'un soutien du Programme Environnement du CNRS dans le cadre du projet "Ecosystèmes continentaux et actions de l'homme".

La responsabilité de ce projet incombe au Laboratoire de Socioécologie et d'Ecoéthologie de l'Université Claude Bernard de Lyon sous la direction du professeur Le Guelte. Cette équipe, dirigée par M. Le Berre, travaille depuis quatre ans à la compréhension des interactions entre populations de Marmottes, milieu naturel alpin et population humaine. La perspective est à la fois scientifique (biologique) et appliquée (gestion des espèces et de l'environnement).

Le volet socio-économique de ce programme multidisciplinaire, dirigé par L.Thiébaut, se propose d'évaluer les différentes demandes concernant la marmotte des Alpes et les coûts qu'elle peut occasionner à l'agriculture.

Sur le plan anthropique, la marmotte est un animal qui participe traditionnellement à l'économie montagnarde en zone alpine. L'évolution des modes de vie en montagne, avec l'avènement du tourisme et la progressive déprise agricole auxquels viennent se greffer le souci de protection du milieu et des espèces (notamment au travers des parcs nationaux) amène à resituer les relations homme-animal.

L'analyse socio-économique présentée dans ce rapport peut contribuer à définir un mode de gestion des populations de marmottes, par la connaissance de l'importance sociale et économique de ce rongeur pour la société, en particulier pour les populations locales et les touristes.

1.Aspects socio-économiques de l'interférence entre les marmottes et les activités humaines

      1.1. Problématique de la recherche

      L'analyse socio-économique se propose de rassembler des estimations des différentes demandes qui portent sur la marmotte et des coûts qu'elle peut occasionner à l'agriculture.

      Il s'agit donc de trouver des indicateurs de l'importance sociale des marmottes, de ses coûts mais aussi de son utilité et ainsi de confronter offre et demande, sans pour autant prétendre approcher une valeur économique.

      1.1.1. Demande

      La marmotte, élément de la faune sauvage, est un bien d'environnement (Thiébaut, 1992) dans le sens où c'est une "production de la nature" dont les conditions de "production" sont modifiées par l'homme.

      Un bien d'environnement peut parfois devenir un bien économique sans pour autant

      acquérir une valeur marchande, c'est pourquoi on attribue à ce type de bien une valeur d'utilité qui dépend de sa rareté et de son usage.

      L'utilité d'un actif naturel correspond ou non à une demande sociale spécifique. La valeur d'un actif naturel peut être décomposée en :

        - Valeurs d'usage :

          - matière première

          - proie (pour l'homme : la chasse)

          - aménité (agrément)

          - service écologique

        - Valeurs d'usage potentiel :

          - valeur d'option

          - valeur de legs

        - Valeur de non usage ou valeur d'existence.

      Dans le cas de la marmotte, plusieurs utilités peuvent être définies et faire l'objet ou non de demandes. Ces utilités peuvent être rapportées comme suit à une grille d'analyse des usages récréatifs de la faune sauvage terrestre en général (Tableau 1).

      Tableau 1 - Satisfaction occasionnée par la faune sauvage

      Composante Activité

      Distance parcourue

      Approche

      Vue

      Toucher

      Capture

      Mise à mort

      Préparation culinaire

      Consommation alimentaire

      Objet durable

      Randonnée

      +

       

      (+)

                 

      Découverte

      +

      +

      +

                 

      Chasse photo

      +

      +

      +

       

      (+)

             

      Catch and release, Déterrage du blaireau sans mise à mort, baguage..

      +

      +

      +

      +

      +

             

      Chasse

      +

      +

      +

      +

      +

      +

      ±

      +

      (+)

      Tir

      -

       

      +

      +

      +

      +

      ±

      +

      (+)

      Achat de viande

      -

      -

      -

         

      (-)

      ±

      +

      -

      Achat de peau

         

      +

      +

             

      +

      Parc de vision

      -

      +

      +

                 

      Cage

      -

      -

      +

      +

               

      Protection

      +

      +

      +

      -

      -

      -

           

      Représentation:

      Carte postale

      (+)

       

      +

               

      ±

      Peluche

         

      +

      +

             

      +

      D'après Thiébaut, 1992

      - La marmotte contribue à l'équilibre naturel comme proie pour l'aigle et le renard, et elle participe à l'entretien des pelouses d'altitude. Mais ces services écologiques sont difficiles à estimer.

      - La marmotte, jusqu'à la seconde guerre mondiale, détenait une valeur comme matière première, offrant viande, peau et graisse aux montagnards. Mais actuellement ces denrées ne sont plus recherchées en France.

      - La demande cynégétique (de chasse) de marmotte est très localisée et peu importante comparativement au chamois, gibier de montagne par excellence. De ce fait, cette demande de prélèvement n'est que partiellement abordée ; elle est estimée à partir de déclarations de chasseurs de montagne et des institutions cynégétiques de Savoie.

      - La demande de marmotte étudiée ici est principalement celle qui est liée aux usages récréatifs des touristes. Cette demande est approchée par l'estimation de consentement à sacrifier du temps et de l'argent pour les marmottes : vision à l'état libre, en captivité ou naturalisée, en randonnée ou à partir de l'hébergement.

      Ainsi les différentes questions inclueront, selon les cas, une estimation de la valeur d'usage (récréatif) et de la valeur d'existence de l'animal.

      Cette recherche d'indicateurs de valeur s'est faite à l'aide d'enquêtes auprès des touristes.

      1.1.2. Offre

      Nous limiterons cet aspect au coût supporté par les agriculteurs dans leur coexistence avec ce rongeur. Ce coût est à priori faible mais son étude est justifiée car les autres coûts des actions humaines qui participent à l'existence de marmotte (protection réglementaire...) sont également faibles pour un animal peu menacé.

      Les dégâts occasionnés par les marmottes aux agriculteurs sont estimés en croisant les déclarations des exploitants eux-mêmes et les dires d'experts.

      D'autre part, des questions aux vacanciers tentent de cerner leurs éventuels consentements à supporter une partie du coût de la marmotte, c'est-à-dire à payer non plus le service récréatif qu'offre la marmotte mais le service qu'offrent les agriculteurs en tolérant l'animal, source de service récréatif et de valeur d'existence.

      Ce dernier point, permet d'aborder le problème de la cohabitation tourisme-agriculture-protection du milieu et de se poser la question de l'évolution d'une telle situation. L'agriculture en montagne doit-elle vivre de sa propre production ou doit-elle être soutenue financièrement pour maintenir l'environnement alpin dans son état actuel ?

      2. Méthodologie des évaluations

        2.1. Démarche préalable

        Cette première partie du travail a consisté à rassembler des données concemant, outre la marmotte et sa biologie, le tourisme en montagne, l'agriculture et la chasse en montagne. Cette collecte de renseignements s'est faite soit depuis Dijon à partir de données bibliographiques, soit par courrier, soit par téléphone ou par entretien avec des organismes professionnels et techniques. La liste détaillée de ces organismes figure en annexe 1 et le lecteur pourra s'y référer quand l'une de ces sources est mentionnée en abrégé dans le texte.

        2.2. Mise en place des enquêtes

        Afin de recueillir les déclarations des publics demandeurs de marmotte (touriste et chasseur) et des agriculteurs qui se plaignent de sa présence sur leurs exploitations, des questionnaires ont été établis.

        2.2.1. Touristes

        Le questionnaire pour les touristes vise à évaluer la part représentée par la marmotte dans l'attractivité pour la montagne au travers de questions générales sur les pratiques touristiques, les connaissances et l'expérience de l'animal, les efforts qu'ils consentent à fournir pour voir des marmottes. D'autre part les vacanciers sont questionnés sur les dégâts de marmottes et les mesures à prendre pour réduire ces nuisances.

        L'enquête de terrain s'est déroulée en deux phases : une pré enquête du 17 au 27 avril sur 52 vacanciers à Bonneval-sur-Arc (plus 9 questionnaires de L.Thiébaut en avril à Fressinière-Hautes-Alpes-) ; l'enquête définitive a eu lieu du 12 au 23 juillet sur cinq communes de Maurienne et de Tarentaise après correction des défauts méthodologiques révélés par la pré enquête. Au cours de cette campagne, 78 questionnaires ont été remplis (annexe 2 : pré enquête touristes et annexe 3 : enquête touristes). Les touristes étaient interrogés au hasard dans les villages, sur les itinéraires de randonnées ou dans les refuges.

        Les réponses des touristes ont été saisies sur un logiciel PCSM afin de procéder à une analyse descriptive des résultats, ainsi qu'à des croisements de variables.

        2.2.2. Agriculteurs

        Le questionnaire élaboré a permis de recueillir les déclarations de dégâts causés par les marmottes aux agriculteurs. Il a été demandé aux agriculteurs quelles étaient, d'après eux les mesures à envisager pour réduire ces nuisances. L'enquête s'est déroulée du 17 au 28 mai dans les mêmes communes que l'enquête touriste et a touché 46 agriculteurs (annexe 4 : questionnaire agriculteurs). Les résultats du questionnaire ont été dépouillés manuellement.

        2.2.3. Chasseurs

        La demande cynégétique n'a été que succinctement évoquée, en interrogeant les chasseurs sur leur intérêt pour la marmotte comme gibier. D'autre part une approche comparative de la chasse au chamois et à la marmotte a eu lieu (avec peu de résultats). Ces entretiens se déroulaient en continuité de l'enquête "agriculteur" (annexe 5 : ébauche de questionnaire chasseurs). Les présidents des sociétés de chasse des communes de Bonneval-sur-Arc, Termignon, Champagny et Tignes ont été rencontrés afin de cerner les pratiques et les aspects réglementaires de la chasse dans les communes, notamment pour la marmotte.

        2.3. Choix des communes

        Le choix des communes d'enquête provient d'une concertation entre l'équipe scientifique de Lyon, qui travaille dans la région depuis quelques années et qui connût bien le contexte agro-touristique, et le Parc de la Vanoise, soucieux de voir dresser un bilan des dégâts de marmottes sur les communes de Bonneval et Termignon (en Maurienne) où les plaintes sont nombreuses, afin d'y apporter une réponse.

        Les enquêtes en Tarentaise (Champagny, Pralognan, Tignes) ont permis de procéder

        à une étude comparative afin de préciser les relations homme-marmotte dans cette vallée et de définir en quoi elles diffèrent de celles de Maurienne, sachant que les marmottes sont aussi nombreuses dans ces deux vallées mais qu'en Tarentaise les responsables locaux et le parc n'avaient pas connaissance de plaintes aussi nombreuses qu'en Maurienne.

    1. 3. Présentation du terrain général de l'étude

    Le terrain de cette étude devait présenter à la fois des populations de marmottes anciennes et nombreuses, des activités touristiques et agricoles développées. Par conséquent, l'étude s'est déroulée dans le département de la Savoie et plus particulièrement sur le territoire du Parc National de la Vanoise (zone centrale et zone périphérique).

    Communes enquêtées en Savoie : (figure 1)

    - Bonneval-sur-Arc et Termignon en Haute Maurienne.

    - Champagny en Vanoise, Pralognan en Vanoise, Tignes en Tarentaise.

      3.1. Situation géographique et Parc National

      * Rappel historique sur la création du Parc National de la Vanoise (PNV)

      Le Parc National de la Vanoise est le premier a être créé en France (décret n° 63.651 du 6 Juillet 1963). Ce parc, comme tous les parcs nationaux , présente deux zones :

      - une zone centrale où l'accent est mis sur la protection de la nature.

      - Une zone périphérique qui fait (ou aurait du faire) l'objet d'un programme de mise en valeur tournée vers les richesses naturelles et culturelles locales, l'agriculture et le tourisme.

      Rappelons que l'un des soucis premiers du parc et l'une des raisons de sa création, étaient de protéger et de reconstituer les populations alors menacées de grands ongulés (bouquetins et chamois).

      *Contexte géographique du parc (zone centrale)

      Le PNV s'étend sur 53 839 hectares, au dessus de la courbe des 2 000 mètres, autour du massif de la Vanoise, lui même encadré par les vallées de la Maurienne et de la Tarentaise. Son territoire s'étend sur 28 communes et il présente une frontière avec le Parc italien du Grand Paradis (figure 2 : carte du PNV). Les cinq communes de l'enquête sont présentes en partie dans la zone centrale du parc.

      3.2. Contexte socio-économique

      Le milieu alpin de moyenne montagne (1 500 à 3 000 mètres) est, depuis le début du siècle, mais plus particulièrement depuis les cinquante dernières années en mutation rapide, en raison de l'évolution des pratiques agricoles et forestières, de la modernisation des industries, de la transformation des réseaux routiers et aériens, du développement des loisirs et du tourisme et de la protection de certains espaces.

      Le tourisme est donc le secteur économique principal dans cette région : l'Observatoire du Tourisme de Savoie (Mission Développement & Prospectives, 1992) a dénombré 18,9 millions journées touristiques pendant l'hiver 1992 et 6,4 millions pendant l'été de la même année.

      Parallèlement, le secteur agricole marque une importante régression : en 1975, 8,9 % des actifs étaient agriculteurs contre 5,9 % en 1988 (SCEES-INSEE, 1990 -Recensement Agricole-).

      Le système agricole, basé sur la production de fromages et d'animaux d'élevage, tend à accroître la vente de produits de qualité directement aux vacanciers et à se tourner vers la double activité des agriculteurs (52 % des chefs d'exploitation sont double actifs en 1988)(SCEES-INSEE, 1990- Recensement Agricole-).

    4. La marmotte et ses impacts

      4.1. Biologie

      La Marmotte des Alpes (Marmota marmota) est un mésomammifère rongeur de la famille des Sciuridés (comme l'écureuil). Son poids est compris entre 3 et 5 kg. La marmotte alpine est un animal semi-fouisseur, diume, héliophile et sédentaire. Son habitat est constitué de milieux ouverts, d'alpages ou de pelouses parsemées de blocs rocheux, de préférence à l'adret (Le Louarn, 1977). En France, la "terra typica" de la marmotte est le domaine alpin situé entre 1 600 et 3 000 mètres. Sa survie dans les environnements enneigés pendant six mois par an, passe par la mise en oeuvre d'une stratégie d'adaptation : l'hibernation. La marmotte entre en léthargie vers la fin septembre dans un terrier aménagé et en ressort fin mars (annexe 6 : structure des terriers). Les marmottes vivent en groupes sociaux de 4 à 12 individus (Perrin, 1991). Le régime alimentaire a pour base la flore des prairies alpines. Les caractéristiques biologiques et éthologiques de la marmotte des Alpes permettent

      d'expliquer l'impact non négligeable de cet animal sur le paysage alpin.

      4.2. Répartition et densité

      En Savoie, la marmotte est présente dans 146 communes sur 326 (CNERA, 1991). Elle est régulière dans les cinq communes d'enquête (figure 3 : statut territorial de la marmotte dans les Alpes françaises en 1989).

      La densité des marmottes est très variable selon la localisation ; dans la Réserve Naturelle de la Grande Sassière, elle atteint 3 individus1 par hectare (Perrin, 1993). C'est également le cas des vallons de la Lenta (Bonneval) et de la Rocheure (Termignon) (communication orale Le Berre, 1993) où les plaintes pour dégâts sont les plus nombreuses (figure 4 : localisation du terrain d'étude).

      l Voir les explications de ces valeurs en annexe 7.

      A titre comparatif la densité de ces rongeurs dans le Parc National des Ecrins est estimée à 1,8 individu et 14,6 trous par hectare (Lafront, 1992). Quant à la densité des terriers, elle est très variable selon les lieux et les auteurs ; à la Sassière elle est proche de 30 terriers1 par hectare (Rodrigue, 1992).

      4.3. Estimation théorique des dégâts de marmottes

      4.3.1. Dégâts agricoles

      La marmotte est un animal herbivore ; selon le laboratoire de socioécologie de Lyon, un adulte prélève pour se nourrir environ 1 kg de végétaux frais par jour, soit 180 kg de frais par an et 20 kg de foin.

      Si l'on considère que la densité est de 3 individus par hectare, le détournement d'herbe atteint 60 kg de foin par hectare et par an. La productivité d'un pré en montagne approchant les 2,8 tonnes/hectare (Lacour, 1990), les marmottes en détournent 2 % pour leur consommation. Notons que les marmottes prélèvent aussi de l'herbe non "agricole". ~

      Une étude canadienne indique que la présence de marmotte commune (Marmota monax) dont le régime alimentaire est proche de l'alpine, à des densités de 1,3 terrier par hectare induit une baisse de la productivité de 0,06 % dans des luzernières (Nuckle, 1982).

       

      De même, selon Bibykov (1991), Marmota flaviventris (marmotte d'Amérique du Nord vivant des steppes à la montagne) provoque une baisse de production de l'ordre de 2 à 6,4 %.

      Le hamster d'Europe (Cricetus cricetus) selon Gorecki (1977), à des densités de 14 individus/hectare, occasionne des dommages évalués à 6 % de la productivité agricole.

      * Le prélèvement d'herbe par les marmottes n'est pas uniquement destiné à des fins alimentaires ; une partie de l'herbe séchée sert à garnir les terriers.

      Selon Kratochvil (1960), un terrier d'été occupé par une femelle abrite 3 kg de foin, celui d'un mâle 1 kg et les terriers d'hiver entre 10 et 15 kg.

      Si l'on considère une zone où la densité des terriers est de 30 par hectare et sachant qu'un domaine vital de dimension moyenne de 2 hectares (Perrin, 1993) contient au moins un terrier d'hiver ; on peut estimer à 35 kg de foin la quantité de foin contenue dans les trous par hectare c'est à dire 1,2 % de la productivité. [Remarque : nous n'avons pas trouvé de référence pour savoir si la totalité de la litière est renouvelée chaque année].


      Marmottière à la Réserve de la Sassière

      * Les marmottes creusent des trous et sortent de grands volumes de terre et de déblais pierreux qui peuvent s'étendre sur plusieurs m2 autour de l'entrée du terrier. Les marmottières (dômes de terre à multiples entrées) atteignent des hauteurs de 50-60 cm et des diamètres de 1,5 à 2 m à la Sassière ou à la Rocheure (Rodrigue, 1992), des volumes de 1 m3 pour les plus récentes à plusieurs m3 pour les plus anciennes.


      Déblais terreux et pierreux à l'étréed'un terrier de marmotte

      A la Sassière, par exemple, on peut calculer le volume de terre excavé par les marmottes, sachant qu'une galerie mesure de 2 à 10 mètres de long pour un diamètre de 16 centimètres : entre 1,2 et 5,7 m3 par hectare. La terre ainsi sortie est étalée sur l'herbe et constitue un manque à gagner, à la fois dans les prairies de fauche et dans les pâtures pour les animaux. S'y ajoute l'activité de piétinement des marmottes.


      Trous et sentiers de marmottes


      Rangée de trous de marmottes le long d'un talus

      4.3.2. Dégâts aux immeubles

      La croissance continue des incisives des marmottes les amène à ronger les boiseries des chalets. Cependant, il semble que ces rongeurs ne s'attaquent qu'aux boiseries des constructions vétustes peu fréquentées. Les marmottes creusent parfois leurs terriers sous les fondations des bâtiments, risquant ainsi un affaissement.

      4.3.3. Dégâts géomorphologiques

      L'activité de creusement des marmottes peut être reliée à des phénomènes de glissement (dynamique géomorphologique) de versants de montagne. Ces phénomènes peuvent aboutir aux mouvements des horizons du sol qui vont se répercuter sur le

      développement de la végétation et sur l'érosion pluviale (CEMAGREF, 1981).

    Suite