4ème Journée d'Étude sur la Marmotte Alpine, Ramousse R. & Le Berre M. eds. : 59-62.
ISBN : 2-9509900-3-7


Programme marmotte dans la Parc national des Écrins : Bilan de la saison 1996


Hervé CORTOT
Parc National des Écrins




Résumé : Une équipe de 5 personnes tente de définir des éléments de gestion de populations de marmottes dans une zone caractérisée par la déprise agricole et le développement du tourisme. La dynamique de la population de marmottes est appréciée par des comptages annuels, des captures-marquages-recaptures, et le suivi de groupes familiaux de marmottes. Des techniques de gestion sont expérimentées : cartographie des terriers, essai de répulsifs et la fréquentation touristique du site mesurée. Des opérations de communications sont engagées auprès de la population locale et des touristes. Des échanges de savoir-faire se développent entre collègues des différents Parcs nationaux. Un programme coordonné de recherches unissant scientifiques et gestionnaires devrait se mettre en place.
Mots clés: Marmota marmota , gestion de la faune sauvage, Parc national, Hautes-Alpes, tourisme.

Abstract: Marmot programme in the Ecrins National Park: State in 1996. A five persons team attempted to define management techniques of a marmot population in an area where farming is declining and tourism increasing. Marmot population dynamics was determined through annual census, capture-marking-recapture, and survey of marmot family groups. Management techniques such as mapping of marmot burrows, repellent tests were tested in the field. Toursitic pressure was determined. A communication programme was developped for rural and tourist populations, as well as sovoir-faire exhanges between National Park managers. A coordinated research programme, including managers and researchers should be developped.
Key words: Marmota marmota , widlife management, National Park, Hautes-Alpes, tourism




Introduction

L'équipe de 4 personnes qui travaille sur le sujet a été renforcée cette année de façon déterminante par Étienne Farand, doctorant de l'Université Claude Bernard Lyon 1.
L'objectif du Parc National est d'obtenir des éléments de gestion d'une population à la confluence de la déprise rurale et du développement du tourisme.

Nos actions s'organisent autour de 4 axes :
- connaissance de la population
- développement des techniques de gestion
- communication
- participation à la connaissance de l'espèce.


La population

Il s'agit de répondre à deux questions : - combien les marmottes sont-elles ?
- quelle est l'évolution de la population ?

Les comptages :
Le site a été compté pour la 3ème fois depuis 1993 suivant la méthode mise au point en 93 (Tron et al. 1993 ; Cortot et al . 1996). Les résultats et plusieurs indices laissent à penser que la méthode utilisée est à saturation et l'équipe a désiré tester cette méthode sur le site bien connu de la réserve naturelle de la Sassière.
Les résultats montrent :
- que la méthode 93 est bien adaptée à des zones en cours de colonisation.
- mais que sur les sites abondamment peuplés, l'intervalle d'incertitude varie de 15 à 30%.
Un nouveau protocole de dépouillement est essayé (le travail de terrain reste le même). Il sera nécessaire de l'affiner en 97. Mais cette nouvelle méthode appliquée au site de Charnière nous donne un résultat de 200 à 240 marmottes, ce qui nous paraît plus proche de la réalité. J. Mary Le Chanony développera le travail qu'il a réalisé (ce volume).

Captures et marquages :
Cent-soixante animaux ont été capturés en 1996, dont 90 pour la première fois. Vingt et un groupes ont été concernés par les piégeages.
Malgré l'utilisation de cages pièges, on note cette année 5 cas de mortalité. Deux cadavres ont pu être confiés à la DSV de Chambéry. Dans 4 cas, la mort est consécutive à l'anesthésie. Tous les animaux capturés sont marqués : 90 par transpondeur (soit environ 40 % de la population du plateau), Trente-sept ont eu en sus un collier. Des essais de marquage auriculaires avec des bagues de couleur permettent des suivis jusqu'à 100 m à la longue vue.

Suivi des groupes familiaux :
Ce travail lourd et délicat mené par E. Farand dans le cadre de sa thèse montre la grande mobilité des limites territoriales. Onze groupes sont connus dans leur composition et leur évolution.

Une enquête sur l'ensemble du Parc National (Zone Centrale + Zone Périphérique, soit 270 000 ha) a interrogé les agents durant l'hiver 95-96. Les populations du massif apparaissent soit stables ou en légère augmentation (Champsaur, Briançonnais, Vallouise), sont en régression (Oisans, Valgaudemar, Embrunais). Quelques sites ont été nouvellement colonisés depuis 15 ans. Dans la vallée du Valbonnais un site en tout début de colonisation est suivi (comptage, cartographie des terriers).


Développement des techniques de gestion

Cartographie des terriers :

La mise au point d'un protocole plus élaboré permet d'évaluer les "dégâts" de marmotte (surfaces stérilisées par les terriers, les pierres retournées et les sentiers utilisés par les animaux) à 410 m2 soit 0,26 % de la surface des terrains fauchés: au total 16 ha. Sur ces 16 ha, 85 % des parcelles sont colonisées. Ce travail est l'une des bases de discussion avec les agriculteurs. Les marmottes détruisent par leurs terriers et sentiers l'équivalent de 6 bottes sur les 1 500 récoltées chaque année. Mais c'est l'un des 2 agriculteurs qui écope de 93 % des dégâts.

Fréquentation du site :
Quelques tests de dérangement des animaux ont été effectués. La tolérance des animaux est importante si il n'y a pas d'effets de surprise. Elle augmente avec la saison et la hauteur de l'herbe. Le problème est essentiellement le piétinement des prairies de fauche avant la fenaison (trois premières semaines de juillet).

Essai de répulsifs :
Les marmottes sont sensibles aux odeurs mais l'utilisation d'un répulsif à gibier (Top gibier) a seulement légèrement perturbé le groupe test après l'essai, les années précédentes, du fuel, du lisier de porc, des crottes de renard, etc...... Peut être faut il poursuivre en direction des ultra sons.


Communication

Information des touristes :

C'est le travail quotidien des personnels présents sur le site. Il est complété par des petits panneaux d'information affichés sur le panneau de Prapic ; l'entrée du Parc est à proximité de la cabane qui sert de lieu d'étude.

Information de la population locale :
Chaque année une soirée est consacrée aux habitants pour faire le point des études et diffuser les derniers documents d'information (conf. en annexe l'affiche annonçant la soirée).

Communication inter parcs :
Les échanges avec nos collègues de la Vanoise se développent. Un film coproduit par les deux parcs a été tourné par A. et E. Lapied : "les marmottes du Grand Rocher". C'est un outil de vulgarisation intéressant.
C'est un chapitre essentiel dans la gestion ; il permet de dédramatiser le débat et d'expliquer les actions en cours comme les enjeux.

Participation à la connaissance de l'espèce
Le site est ouvert à de nombreuses collaborations avec l'extérieur dans le domaine de la biométrie, Université de Lyon ; de la génétique, Université de Grenoble ; du parasitisme, D.S.V. de Chambéry et le suivi d'un groupe de pseudo albinos.


Au total une bonne année 96
- Une enquête donne une photographie sur l'ensemble du Parc. Certes elle est très floue mais complète l'inventaire présence-absence réalisé par maille dans les années 80. Elle signale le manque de connaissance des populations.
- Les méthodes de dénombrement s'affinent. Il semble qu'il y ait besoin de plusieurs méthodes en fonction des situations à appréhender. Nos travaux se poursuivront dans ce sens en 1997.
- La cartographie des terriers permet de bien évaluer les problèmes d'impacts directs.
L'arrivée d'E. Farand permet de démultiplier nos capacités d'actions et de renforcer le lien avec les autres équipes. Il serait temps de soumettre un programme coordonné de recherche unissant scientifiques et gestionnaires à nos autorités de tutelle.


Bibliographie

Cortot H., Francou M., Juan D., Tron L., Le Berre M. & Ramousse R. 1996 .
Mise au point d'une méthode de dénombrement des marmottes alpines dans le Parc National des Écrins. Development of a counting method of Alpine marmot in the Ecrins National Park. In Biodiversité chez les marmottes /Biodiversity in marmots, Le Berre M., Ramousse R. & Le Guelte L. eds., International Marmot Network, 23-28.
Cortot H., Lafront C., Papet R. & Tron L. 1992.
Étude d'une population de marmottes. Plateau de Charnières-Orcières (05), Parc National des Ecrins. In 1ère Journée d'étude sur la marmotte alpin e, Ramousse R. & Le Berre M. eds., 17-22.
Farand E. 1995.
Impact de la marmotte alpine (Marmota marmota , L.) sur la richesse et la composition floristique de prairies de fauche de l'étage montagnard supérieur. Rapport technique, DEA Analyse et Modélisation des systèmes biologiques, Lyon, 32 pp.
Juan D. 1994.
Etude de la fécondité et éléments de dynamique d'une population de marmotte alpine. Prapic1994. Rapport Parc National des Ecrins, 17 pp.
Juan D. 1994.
Compte-rendu des comptage-marmottes de 1994. Premier bilan. Rapport Parc National des Ecrins, 15 pp.
Lafront C. 1992.
Etude éco-éthologique d'une population de marmottes alpines ( Marmota marmota L.) dans le Parc National des Ecrins. Rapport maîtrise CGEN, Paris VII.
Papet R. 1989 .
Comparaison de méthodes de captures de marmottes ( Marmota marmota) et relevé biométriques . Rapport de stage BTA, Gestion de la faune sauvage.
Tron L., Cortot H. & D. Juan 1993 .
Suivi des marmottes sur le plateau de Charnière. Essai de dénombrement. In 2ème Journée d'étude sur la marmotte alpine , Ramousse R. & Le Berre M. eds., 55-60.



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