Armitage 96
Biodiversité chez les marmottes / Biodiversity in marmots,
Le Berre M., Ramousse R. & Le Guelte L. eds., International Marmot Network, 223-226.
ISBN : 2-9509900-0-2


Augmentation saisonnière de la masse chez la marmotte à ventre jaune

Seasonal mass gain in yellow-bellied marmots


ARMITAGE K.B.
Departement of Systematics and Ecology, The University of Kansas, Lawrence, KS 66045-2106 USA

Tous les groupes d'âge et de sexe achèvent leur augmentation de masse corporelle au cours de trois à cinq semaines précédant l'hibernation. Le nombre de jours de croissance varie suivant les groupes. Les mâles de tout âge croissent plus rapidement que les femelles. Les femelles reproductrices atteignent leur croissance post-lactation en 6 semaines ; tous les autres groupes ont terminé leur augmentation de masse en 8 semaines au moins.
Mots-clés : Marmotte à ventre jaune, Marmota flaviventris,Taux de croissance, lactation, période de croissance, arrêt de la croissance de la masse corporelle.

All age-sex groups of marmots complete mass gain up to three to five weeks before hibernating. The number of days of growth varies among age-sex groups. Males of all age-sex groups grow more rapidly than females. Reproductive females complete post-lactation growth in 6 weeks; all other age-sex groups complete mass gain in no less than 8 weeks.
Key-words: Yellow-bellied marmot, Growth rate, lactation, growth period, body-mass stasis.



INTRODUCTION

Les marmottes à ventre jaune (Marmota flaviventris) ont une période d'activité d'environ 150 jours pour croître, se reproduire, et s'engraisser en vue de l'hibernation. Bien que la masse de toutes les classes d'âge et de sexe augmente normalement (Armitage et al. 1976), la part de cette saison d'activité utilisée par chaque classe pour gagner du poids n'a pas été déterminée. Ce travail présente le canevas et le taux d'accroissement de la masse chez la marmotte à ventre jaune du Colorado, U.S.A.

MÉTHODES

Entre 1990 à 1993, les marmottes ont été capturées vivantes et pesées de l'émergence jusqu'à l'entrée en hibernation. Les marmottes étant difficiles à capturer en fin de saison active, les données des quatre années ont été combinées de façon à avoir un échantillon suffisant. Ceux des mâles adultes et des mâles d'un-an sont insuffisants du fait que les premiers sont particulièrement difficiles à capturer après la mi-été et que les seconds se dispersent presque tous.


RÉSULTATS ET DISCUSSION

Le nombre de jours d'accroissement de la masse varie fortement suivant les classes d'âge et de sexe (Tableau 1). Le taux de croissance de la masse varie moins fortement, mais il est plus élevé chez les mâles que chez les femelles quelle que soit leur âge. Cette différence s'explique par le fait que le poids des mâles de tout âge est plus élevé que celui des femelles de même âge (Armitage et al. 1976). Le gain de masse corporelle nécessite moins de jours pour les mâles que pour les femelles (Tableau 1) et toutes les classes de mâles ont le même canevas de croissance ; c'est-à-dire, une période rapide de croissance suivie d'une période d'arrêt (Figure 1). Cette dernière peut durer jusqu'à 3 semaines chez les jeunes mâles et 8 semaines chez les mâles adultes avant l'entrée en hibernation. La masse de quelques individus diminue au cours de cette période.

Le patron de gain de la masse est similaire chez les femelles non reproductives et chez les mâles (Fig. 2). Une croissance rapide est suivie d'une période de stase qui peut durer jusqu'à 5 semaines chez les adultes. Les périodes de croissance des femelles d'un-an et de deux-ans ne sont pas plus longues que celle des adultes (Tab. 1), probablement parce qu'ils développent leur taille ainsi que leurs réserves graisseuses pour l'hibernation. Le patron de croissance des femelles reproductrices est arrêté par la lactation, qui dure de 3 à 4 semaines (Fig. 3). Dix femelles sur 14 avaient perdu entre 30 et 330 g (x = 162 +/- 87,5), alors que les 4 autres femelles avaient gagné de 10 à 80 g (x = 47,5g). Les patrons de gain ou de perte de masse varient fortement parmi les femelles reproductrices (voir Fig. 3). Ces différences reflètent probablement des différences entre les individus, les années et les habitats. Ce patron de gain de masse varie largement en mai. Au cours de cette période, certains individus accroissent faiblement ou pas du tout leur masse pendant un semaine ou plus (Fig. 2, 3) et quelques uns peuvent présenter une perte de masse pendant une courte durée (Fig. 1). En outre, les femelles reproductrices peuvent aussi compléter leur gain de masse ou entrer dans une période de stase ou même de perte de masse pendant plus de 3 semaines avant l'entrée en hibernation. Quand les périodes de pré-lactation et post-lactation sont combinées, les femelles reproduc-trices nécessitent plus de temps pour leur gain de masse que les femelles de 3 ans ou plus. Les femelles repro-ductrices ont besoin de 7 à 10 jours pour regagner la masse perdue au cours de la lactation ; cette période de temps correspond à peu près à la différence entre le nombre de jours de croissance des deux groupes de femelles, qui accroissent leur masse à la même vitesse (Tab. 1). La principale différence entre les patrons de croissance est que en moyenne les femelles reproduc-trices atteignent leur masse d'hibernation environ 3 à 4 semaines plus tard que les femelles adultes qui ne se sont pas reproduites. Ainsi, les femelles qui se reprodui-sent et les jeunes sont les catégories les plus vulnérables à tous les facteurs, c'est-à-dire, un printemps tardif, une sécheresse d'été qui limite la période de croissance.

Les patrons suggèrent que tous les animaux accroissent leur masse le plus tôt possible dans la saison, ce qui permet de réduire la probabilité que la sénescence de la végétation ne survienne avant que l'augmentation de la masse soit assurée. Pourquoi les individus retardent-ils leur entrée en hibernation alors que l'hibernation suit typiquement le pic d'augmentation de la masse (Davis 1976)? Trois explications sont possibles. D'abord, les mâles sont territoriaux tout l'été (Armitage 1974) et se défendent contre tout intrus de façon à avoir la possibilité de s'accoupler au printemps suivant (Salsbury 1993). Deuxièmement, les femelles reproductrices passent plus de temps à s'occuper des jeunes lorsque ces derniers fourragent ; en conséquence, ces adultes sont engagées dans des stratégies anti-prédatrices faisant partie de l'investissement maternel vis à vis des jeunes. Troisièmement, l'énergie utilisée pendant l'hibernation, en août, n'est plus disponible au printemps suivant quand celui-ci est tardif ou que les conditions climatiques sont froides ou orageuses et ne permettent pas aux animaux de fourrager. La fin de l'hiver n'est pas prévisible, aussi les marmottes restent actives, maintiennent leur masse corporelle par une alimentation limitée, et conservent des ressources pour une utilisation à la fin de l'hiver. Dans notre région, l'hibernation semble se mettre en place quand la végétation est devenue sénescente et que les animaux ne peuvent plus maintenir leur masse corporelle.

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Tableau 1. Nombre de jours de croissance et gain de masse. Moyenne, déviation standard et échantillon.
Table 1. Number of days of growth and mass gain. All values are mean +/- standard deviation (N)

Number of days Grams/day
Reproductive females, post-lactation 42.4 +/- 5.7 (10) 19.9 +/- 7.4 (17)
Reproductive females, pre-lactation 39.5 +/- 9.9 (15) 14.2 +/- 6.9 (15)
Non-reproductive females 16.3 +/- 4.1 (15)
Two-year-old 85.9 +/- 9.1 (3)
Three-year-old or older 70.0 +/- 18.6 (7)
Pre-lactation period 16.3 +/- 9.3 (14)
Adult males 64.3 +/- 14.8 (6) 24.2 +/- 7.1 (15)
Yearling females 93.1 +/- 6.7(10) 21.1 +/- 4.9 (17)
Yearling males 67.8 +/- 12.1 (5) 26.5 +/- 6.7 (17)
Young females 58.3 +/- 14.5 (27) 16.0 +/-5.4 (27)
Young males 61.2 +/- 13.6 (30) 19.8 +/- 6.7 (30)
Figure 1. Patrons des gains de masse corporelle des mâles chez les marmottes à ventre jaune. Pattern of gain of body mass by male yellow-bellied marmots.

Figure 2. Patrons des gains de masse corporelle des femelles non-reproductrices chez les marmottes à ventre jaune. Pattern of body mass gain by non-reproductive female yellow-bellied marmots.

Figure 3. Canevas des gains et pertes de masse de quatre femelles reproductrices chez les marmottes à ventre jaune. Pattern of mass gain and loss for four reproductive female yellow-bellied marmots.

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INTRODUCTION

Yellow-bellied marmots (Marmota flaviventris) have an active season of about 150 days in which to grow, reproduce, and fatten for hibernation. Although all age-sex groups normally gain mass (Armitage et al. 1976), it was not previously determined how much of the active season is used by the various age-sex groups for mass gain. This report presents the pattern of mass-gain and rate of mass-gain for yellow-bellied marmots in Colorado, U.S.A.


METHODS

From 1990 through 1993, marmots were live-trapped and weighed from shortly after emergence from until immergence in hibernation. Marmots are difficult to trap late in the active season, thus data are combined over the four years in order to obtain a sufficient sample size. Samples are scanty for adult males (they are especially difficult to trap after mid summer) and yearling males, because nearly all disperse.


RESULTS AND DISCUSSION

The number of days of mass-gain varied widely among the age-sex groups (Table 1). Rate of mass gain varied less widely, but was greater in males than in females at all ages. This difference in rate of mass gain accounts for males of all ages being heavier than similar-aged females (Armitage et al. 1976). As a group, males use fewer days than females for mass gain (Table 1) and all age groups of males have the same pattern of growth; i.e., a period of rapid growth followed by a period of mass stasis (Fig. 1). The period of stasis may be as large as 3 weeks in young males and 8 weeks in adult males before immergence. Some individuals lose mass during this period.

The pattern of mass-gain in non-reproductive females is similar to that of males (Fig 2). Rapid growth is followed by a period of stasis which may be as long as 5 weeks in adults. Yearling and two-year-old females have longer growth periods than adults (Table 1), probably because they are growing in size as well as accumulating fat for hibernation. The growth pattern of reproductive females is broken by lactation, which lasts for about 3 to 4 weeks (Fig. 3). Ten of 14 females lost from 30 to 330 g (x = 162 +/- 87.5 SD) of mass whereas 4 females gained from 10 to 80 g (x = 47.5 g). The pattern of mass gain and loss varied widely among reproductive females (see Fig. 3). These differences probably represent individual differences as well as differences between years and between habitats. Note that the pattern of mass gain varies widely in May. Some individuals gain little or no mass for a week or more (Fig. 2, 3) and some individuals may lose mass for a short period during this time of year (Fig. 1) Furthermore, reproductive females may also complete mass gain and enter a period of stasis or even mass loss for up to 3 weeks before immergence. When pre-lactation and post-lactation growth periods are combined, reproductive females require more days for mass-gain than do 3-year-old or older females. Reproductive females require 7 to 10 days to regain the mass lost during lactation; this time period is about equal to the difference in the number of days of growth for the two groups of females. Both groups of females gain mass at about the same rate (Table 1). The major difference in growth patterns is that the average reproductive female achieves hibernation mass about 3 to 4 weeks later than the average non-reproductive adult female. Thus reproductive females and young are the groups most vulnerable to any factors; e.g., late spring, summer drought, that decrease the length of the growing season.

The pattern of mass gain suggests that all animals gain mass as early in the season as possible. This pattern reduces the likelihood that the vegetation will become senescent before mass-gain is completed. Why do these individuals delay immergence when hibernation typically follows the peak of body mass (Davis 1976). Three explanations for this delay are plausible. First, adult males are territorial throughout the summer (Armitage 1974) and defend against intruders in order to have access to mating the following spring (Salsbury 1993). Second, reproductive females apparently spend much time in wariness behaviors while their young are foraging; hence the adults are engaged in anti-predator strategies as part of maternal investment in their offspring. Third, energy used during hibernation in August is not available for use the following spring when it may be needed if spring comes late or if spring weather is cold and stormy and animals cannot forage. The end of winter is unpredictable, thus marmots remain active, maintain body mass by limited foraging, and conserve resources for possible use at the end of winter. In our area, hibernation seems to occur when the vegetation is becoming senescent and animals may no longer be able to maintain body mass.

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BIBLIOGRAPHIE/REFERENCES

ARMITAGE K.B. 1974. Male behaviour and territoriality in the yellow-bellied marmot. J. Zool., Lond., 172: 233-265.
ARMITAGE K.B. J.F. DOWNHOWER & G.E. SVENDSEN 1976. Seasonal changes in weights of marmots. Am. Midl. Nat., 96: 36-51.
DAVIS D.E. 1976. Hibernation and circannual cycles of food consumption in marmots and ground squirrels. Q. Rev.Biol., 51: 477-514.
SALSBURY M. 1993. Reproductive energetics of adult male yellow-bellied marmots. Ph. D. Dissertation, Univeristy of Kansas, Lawrence.

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