LA RESERVE DE BIOSPHERE DE MANANARA-NORD


La Réserve de Biosphère de Mananara-Nord a une superficie de 140.000 ha environ, soit un tiers de la superficie du Fivondronana du même nom, et compte une population de 47.200 habitants (recensement 1993). Les limites physiques naturelles de la Réserve sont facilement identifiables : ce sont les fleuves Mananara et Anove, les rivières Sandrakatsy et Fotsialanana, et l'Océan Indien







Le Aye-Aye, point de départ



L'histoire de la Réserve de Biosphère de Mananara est indissociable de celle de sa mascotte : le Aye-Aye (Daubentonia madagascariensis).

Cette espèce fait partie de l'annexe 1 de la CITES et est classée espèce menacée dans le Red Data Book de l'UICN. A Madagascar, il est légalement protégé par la loi 61/096 du 16 Février 1961 qui porte tous les Lémuriens comme prioritaires en matière de Conservation de la faune.

Sur 23 espèces de lémuriens sont recencés à Madagascar, 11 espèces appartiennent au domaine de l'Est.(Pollock J., 1987) dont on en rencontre 9 à Mananara-Nord
Liste des espèces de Lémuriens recensés dans la région de Mananara-Nord
Nom scientifiqueNom françaisObservations*
Allocebus trichotisAllocèbeRedécouvert en 1987
Avahi laniger Avahi, Maki à bourreVulnérable
Cheirogaleus majorGrand Cheirogale 
Daubentonia madagascariensisAye-AyeMenacé
Indri indriIndriMenacé
Hapalemur griseusPetit HapalémurVulnérable
Lemur fulvusLémur brunVulnérable
Microcebus rufusMicrocèbe 
Varecia variegataVari, Lémur vari, Maki variMenacé
*classification UICN

Le Aye-Aye, qui est certainement un des plus remarquables Lémuriens de Madagascar, a été signalé pour la première fois par Sonnerat en 1782. En 1933, une dépouille fut la dernière trace de l'animal trouvée à Madagascar (Rand A.L., 1935). On pensait l'espèce disparue, jusqu'à sa redécouverte en 1957 par J.J. Petter dans la forêt orientale de l'île près de Mahambo à quelques kms au Nord de Mananara-Nord (Petter J.J., 1959). Un programme de protection fut mis en place pour soustraire le Aye-Aye du danger que représentait pour lui la disparition de son habitat naturel. On introduisit alors dans la Réserve de Nosy Mangabe quelques individus afin qu'ils puissent s'y reproduire en liberté. Neuf animaux y ont été relâchés et on peut actuellement observer une vingtaine d'individus, ce qui prouve que ce programme a été bien mené. Signalé depuis dans plusieurs endroits de la côte orientale (en particulier dans la région de Mananara-Nord) mais aussi sur la côte occidentale, il est cependant très difficile d'estimer la population actuelle dans l'île

Jusqu'à présent cet animal était tabou et les populations le craignaient car il était considéré comme un mauvais présage. Or, la régression de la forêt primaire le pousse à chercher sa nourriture dans les plantations. Il cause ainsi de sérieux dommages aux cocoteraies dont il mange les jeunes fruits. Le mécontentement des paysans fait qu'ils n'hésitaient plus à le traquer la nuit avec des chiens ou même à le manger (Ancrenaz M., 1991). Ce nouveau conflit risquait à terme de menacer directement la survie de l'espèce bien qu'elle soit protégé à double titre par la loi et les coutumes ancestrales.

En 1987, afin de proposer une solution durable et acceptable à ce problème, un groupe de scientifiques et de forestiers a suggéré de trouver une solution combinée en appliquant une approche intégrée qui satisferait à la fois les besoins prioritaires des paysans et la Conservation de l'habitat du Aye-Aye. Le cadre conceptuel et structurel des "Réserves de Biosphère" a été identifié comme le plus adéquat pour atteindre cet objectif.

Bien entendu, le choix de Mananara-Nord n'a pas été basé uniquement sur la présence du Aye-Aye.

On peut dégager trois raisons principales à la création de la "Réserve de Biosphère" de Mananara-Nord :

La problématique a également été élargie et replacée dans un cadre beaucoup plus global de Conservation et Développement Régional Intégré.







Mananara-Nord : une Réserve de Biosphère à part entière



Par l'arrêté No 893/MFR/FOR du 19 Mars 1965 les forêts de Verezanantsoro, d'Ivontaka Nord et Sud ont été délimitées et ont obtenu le statut de Forêts Classées en vue de les soustraire à la pratique du défrichement pour protéger les versants contre les phénomènes d'érosion et constituer une réserve de bois pour des futures exploitations forestières.

En Septembre 1987, un Atelier multidisciplinaire était organisé à Mananara-Nord par l'UNESCO (Actes de l' Atelier de Mananara-Nord, 1987) pour définir les conditions institutionnelles, légales, techniques et sociales nécessaires à la création de la première Réserve de Biosphère du pays. A la suite de celà, un séminaire international réunissant les îles de l' Océan Indien a eu lieu à Toamasina en 1988 (Maldague M. et al., 1989) sur le thème de la gestion de l' Environnement et des ressources naturelles



Le projet, lancé en Octobre 1988 a été suivi en Juillet 1989 par la publication du décret présidentiel ndeg. 89/126 portant création de la Réserve de Biosphère de Mananara-Nord en lui donnant un statut légal. Le texte de loi précise les limites de la Réserve et de ses différentes zones.

La Réserve est divisée en trois zones :







Un problème en suspens: les occupations humaines des aires centrales



Les forêts de Verezanantsoro, Ivontaka Sud et Ivontaka Nord qui ont eu un statut de Forêt Classée à partir de 1965 forment actuellement le noyau dur du Parc National Terrestre.

Les occupations humaines actuelles sont le fait de communautés qui étaient soit déjà installées avant le classement de 1965 soit de manière plus récente. C'est après 1972, date d'un changement de régime politique à Madagascar que les occupations ont été les plus massives. La liberté et le pouvoir donné au peuple ont été mal interprétés.

Tous ces occupants savent qu' ils sont en état d'infraction et leur installation résulte d'un certain laxisme à un moment donné de la part des responsables de l'application de la législation.

Une solution à visage humain acceptable par la population et par les autorités doit être proposée pour régler ce problème